Par : Me Julie Couture | Publié le : 29 novembre 2024
Qu’est-ce que c’est, le partage d’images intimes sans consentement?
Commençons par la base : au Canada, le fait de publier, texter ou partager des images intimes de quelqu’un sans son consentement constitue un crime. Dans des termes juridiques, on appelle cela de la distribution non consensuelle d’images intimes. Il est important de noter que le terme « images » inclut autant les photos que les vidéos.
Il arrive souvent que des partenaires s’échangent des images intimes alors que la relation va bien. Malheureusement, lorsque des événements moins agréables surviennent, on assiste parfois à une forme de cyberintimidation et de vengeance. Elle est plus connue en anglais sous l’expression « revenge porn » (vengeance pornographique). Après une rupture ou un événement, un des deux partenaires décide de publier, envoyer ou distribuer des images intimes de l’autre. Ceci est fait dans le but de nuire à sa réputation ou de se venger. Les images qui se retrouvent sur internet se répandent alors de manière incontrôlable et causent des dégâts souvent irréparables aux victimes.
Il arrive qu’il en découle de la sextorsion. Selon Statistiques Canada, le nombre de cas de sextorsion déclarés à la police au Canada a augmenté de près de 300 % dans les dix dernières années..
La sextorsion (ou extorsion sexuelle) est une forme de chantage où quelqu’un menace d’envoyer une photo ou une vidéo à caractère sexuel à des amis, à des membres de sa famille ou à d’autres personnes s’il refuse d’envoyer de l’argent, de fournir plus de contenu sexuel ou de faire ce qu’on lui demande.
quand la victime ou la personne accusée d’envoi d’images intimes sans consentement est mineure
Dans le cas où la personne qui figure sur les images est mineure, la personne qui a publié ou distribué les images pourrait également faire face à des accusations de possession et de distribution de pornographie juvénile.
Même si la personne qui a envoyé ou publié les images sans consentement est elle-même mineure, le geste demeure un crime. Les personnes sont considérées comme étant responsables de leurs actes dès l’âge de 12 ans. Les plus jeunes générations grandissent avec des téléphones intelligents connectés à l’internet. C’est donc particulièrement important d’expliquer aux adolescents et jeunes adultes la portée de leurs actes en lien avec le partage des images intimes sans consentement. Il faut les conscientiser aux conséquences possibles.
Une nouvelle loi pour s’attaquer au problème
Hier, le 28 novembre 2024, la loi québécoise contre le partage d’images intimes sans consentement a été adoptée. C’est le projet de loi 73 du ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, qui a été présenté le 3 octobre dernier. Il a été adopté jeudi à l’unanimité à l’Assemblée nationale.
Un des principaux problèmes avec le partage illégal d’images intimes sans consentement, c’est la rapidité avec laquelle celles-ci se répandent sur internet et dans les appareils des utilisateurs. Il devient pratiquement impossible pour une victime de retracer chaque image, encore moins de les supprimer. Le projet de loi du ministre de la Justice offre une solution à ce problème. On prévoit un processus simple afin d’empêcher ou de faire cesser rapidement le partage sans consentement d’une image intime. La victime pourra obtenir une ordonnance après avoir rempli un formulaire en ligne ou dans un palais de justice. Le but est de rendre le processus de retrait des images le plus rapide possible afin de minimer les dommages subis par la victime.
Le projet de loi s’attarde aussi au fait de menacer de partager des images intimes sans consentement. Il en va de même pour les sites internet qui diffusent le matériel obtenu sans le consentement des personnes qui figurent sur les images.
Dans le cas de non-respect d’une ordonnance de retrait d’images intimes partagées sans consentement, les amendes prévues sont salées. Elles pourraient atteindre jusqu’à 50 000$ par jour où les images ne sont pas entièrement retirées. Les contrevenants pourraient même faire face à une peine d’emprisonnement. On ne rigole plus.
La loi prévoit également davantage de ressources et de soutien pour l’accompagnement des victimes.
Avec cette nouvelle loi, Québec lance un message clair. Le partage d’images intimes sans consentement est non seulement un crime, mais un phénomène croissant contre lequel notre société se donne des outils mieux adaptés à la réalité technologique actuelle.
Mieux vaut réfléchir que d’agir impulsivement
Le phénomène de sextorsion et de partage d’images intimes sans consentement a explosé dans les dernières années. On peut associer ce phénomène à l’accès pratiquement universel aux appareils mobiles connectés qui possèdent des caméras photo et vidéo.
Si vous possédez des images intimes de quelqu’un dans votre appareil, vous n’avez pas le droit de les partager. C’est le cas même si les images ont été obtenues avec le consentement de la personne. Avant d’agir sous l’impulsion du moment ou d’une émotion intense, mieux vaut réfléchir aux conséquences qui sont liées à ce geste. Ce qui peut sembler une bonne idée sur le coup de l’émotion peut s’avérer une grave erreur. Une erreur dont vous risquez de subir les conséquences longtemps par la suite.
Les rapprochements lors des fêtes de fin d’année : attention au consentement
On le sait, la fin de l’année est la période des Fêtes. C’est le moment des grands rassemblements, des soupers bien arrosés et des célébrations festives! Or, tout comme c’est le cas avec la consommation d’alcool, il faut demeurer prudent avec les rapprochements intimes. L’alcool et les célébrations créent des climats qui peuvent s’avérer propices à ceux-ci. Or, il est de la responsabilité de chacun de toujours s’assurer d’avoir le consentement de l’autre avant de passer à l’acte. Le consentement est nécessaire, qu’il s’agisse d’un simple baiser, d’attouchements ou de relations sexuelles.
N’oublions pas non plus que le consentement est requis pour chaque activité sexuelle. Avoir consenti à embrasser quelqu’un ne signifie pas que l’on a consenti à une relation sexuelle. Le fait d’avoir consenti à une relation sexuelle ne signifie pas que l’on a consenti à être filmé ou pris.e en photo pendant l’acte. Finalement, le fait d’avoir consenti à être filmé.e pendant l’acte ne signifie pas que l’on consent au partage ou à la diffusion de ces images intimes. Et ainsi de suite. Le consentement est nécessaire à chaque étape et à chaque activité. Si le consentement d’un des deux partenaires n’est pas respecté, il s’agit d’une agression sexuelle.
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