Voilà une autre histoire concernant le consentement à des relations et des actes sexuels qui fait beaucoup de vagues ces jours-ci. L’affaire de Tania Pontbriand est un mélange de dilemmes moraux et de gestes potentiellement criminels.
Requête en arrêt des procédures
L’avocate de Tania Pontbriand a présenté une requête en arrêt des procédures cette semaine. De l’opinion de la défense, les délais avaient pour effet de provoquer un préjudice chez l’accusé. Depuis juillet 2008, c’est-à-dire depuis le dépôt des accusations, l’impact sur la vie de l’accusée est considérable. Elle est en congé sans solde de son emploi d’éducatrice et est incapable de se trouver un nouvel emploi. La requête fût malgré tout rejetée par le juge François Beaudoin.
Simple, mais compliqué
Les faits présumés sont relativement simples. Il est question ici d’une femme d’âge mûr qui aurait choisi d’entretenir une relation amoureuse avec un jeune adolescent. Elle était sa professeure d’éducation physique et de « leadership ». Le jeune adolescent en question était alors âgé de 15 à 17 ans au moment des faits reprochés, c’est-à-dire de 2002 à 2004.
Les accusations (sous réserve)
Tania Pontbriand est aujourd’hui accusée d’agressions sexuelles et d’actes sexuels alors qu’elle était en situation d’autorité. Selon les faits qui sont relatés dans les médias et tirés du témoignage de la présumée victime, l’intensité de la relation ne se dément pas.
Elle aurait tout fait pour entretenir des relations sexuelles avec cet adolescent, mais nous ne croyons pas qu’il soit nécessaire d’étayer les faits dans le présent billet. Les médias ont largement repris l’histoire (vous pouvez cliquer sur ces liens Presse Canoë, TVA nouvelles et Cyberpresse).
L’âge du consentement sexuel
Il est important de bien expliquer l’état du droit en pareille matière. Depuis 2008, l’âge du consentement sexuel a été haussé à 16 ans. Cela veut donc dire que actuellement si une personne est accusée d’une infraction d’ordre sexuel (dont contact sexuel ou agression sexuelle) à l’égard d’une personne âgée de moins de 16 ans, le fait que cette personne ait consentie aux rapports sexuels n’est pas une défense admissible.
Le droit applicable
En droit criminel, le droit qui s’applique est le droit en vigueur au moment des faits. Or, entre 2002 et 2004, l’enfant mineur pouvait consentir légalement à des actes sexuels dès l’âge de 14 ans. Si l’accusé n’est pas en situation d’autorité au moment des faits reprochés, il ne peut y avoir d’agression sexuelle ou d’actes sexuels illégaux.
Quand l’autorité vicie le consentement
Tels qu’ils sont rapportés, les faits sont que le jeune adolescent a manifestement consenti lors des relations sexuelles. Mais cela est de peu d’importance puisque le consentement de l’adolescent aurait été vicié par la relation d’autorité qu’entretenait Tania Pontbriand à son égard.
Les actes sexuels en situation d’autorité
Pour les actes sexuels, les éléments de l’infraction sont relativement simples. La Couronne devra démontrer que l’accusé a touché ou invité à toucher une partie du corps de l’adolescent (directement ou indirectement) et que cela fût à des fins d’ordre sexuel.
La Couronne devra également démontrer Tania Pontbriand était en situation d’autorité ou de confiance vis-à-vis de l’adolescent ou à l’égard de laquelle l’adolescent est en situation de dépendance (a. 153).
Les agressions sexuelles
Pour ce qui est de l’agression sexuelle où il y a l’exercice d’une quelconque autorité, les éléments de l’infraction sont beaucoup plus difficiles à démontrer. Comme nous l’avions mentionné précédemment, puisque l’âge du consentement était de 14 ans à l’époque, le consentement est présumé valide. Le fait que le plaignant a consenti aux actes à l’origine de l’accusation constitue donc un moyen de défense admissible.
Le consentement vicié
Dans un tel cas, nous pourrions considérer que le consentement est vicié. Le tribunal devra évaluer les caractéristiques de la relation. Il devra constater qu’il y avait véritablement l’ « existence d’une inégalité de rapport de force et de dépendance », « l’exploitation de cette inégalité » et « l’effet causal de cet exercice de l’autorité sur le consentement du plaignant » (R. c. Lapointe, REJB 2001-27382, [2001] J.Q. no 6001).
Laissez votre opinion
Que pensez-vous de toute cette histoire? Le débat peut se révéler intéressant. Évidemment, l’intention du législateur était de criminaliser les relations sexuelles forcées. Le contexte où la présumée victime peut se sentir forcée à consentir est multiple et n’est pas sur le point de cesser de susciter des débats.
Texte Avocat Laval
On peut rapprocher cette affaire de celle de Gabrielle Russier,en France en 1969, on sortait de Mai 68 et la libération des meurs prenait un virage à 180 degrés. Cette histoire d’amour entre une enseignante et un des élèves de 16 ans lycée fut tellement dérangeante pour la société de l’époque que le procès pris des proportions sans mesure. Elle fut condamnée à un an ferme et une amende pour détournement de mineur, la droite bien pensante déchaînée et sa presse moraliste conduisit l’enseignante au suicide avant sa comparution en appel.
Retour sur L’affaire du moment:
Bien que nos sociétés ait évolué les termes d’accusation se sont durcis. De détournement de mineur on est passé à agression sexuelle…
Alors que les gamins ont un accès de plus en plus plus précoce et de plus détaillé, déformé à la sexualité notamment via la pornographie, on recule le consentement sexuel de deux ans.
N’y a t il pas un coté conservateur pudibond faux cul à l’américaine dans ce genre de défense de la bonne morale ?
J’accorde le droit à cette dame et à ce garçon de tomber amoureux, il n y a d’agression nulle part dans cette situation. Et la situation d’autorité exercée n’est qu’une condition de ce vécu humain.
Un peu de considération du facteur coeur devrait être appliqué dans le jugement alors qu’il me semble que le jeune homme, aujourd’hui errigé en victime n’à pas grand chose à gagner dans sa construction d’homme à voir salir en cour sa première histoire d’amour.
Merci pour la qualité de votre commentaire. Effectivement vous soulevez d’excellents points. Je crois que la situation d’autorité lui sera fatale et le juge n’aura aucun autre choix. Elle sera trouvée coupable et aura une peine de prison. L’emprisonnement avec sursis demeure une hypothèse étant donné que le crime a été commis avant les modifications au Code criminel. Encore une fois merci de votre intérêt ! Salutations
M « Honda » aurait-il une vision aussi romantique et anti-puritaine de la chose si l’enseignante était un enseignant? Et la victime, sa propre fille adolescente? Ou pourquoi pas, un p’tit gars?
Ce que je déplore dans cette cause, est qu’on semble mettre cette relation « à part » parce que l’accusée est une femme, plutôt qu’un homme. A l’heure de l’égalité des sexes, cette perception relève d’une malhonnêté intellectuelle qui fait fi de l’impact psychologique profond sur la jeune victime qui a été tenu (menacé?) au secret tout au long.