Un jugement presque unanime de la Cour suprême (8 contre 1) a été rendu ce matin. Ce dossier a tous les éléments pour susciter une panoplie de réactions dans le public! On a un meurtre, un acquittement et des violations dela Charte canadienne.
Le 22 juillet 2006, Armande Côté avait signalé le 9-1-1, vers 21h00, pour rapporter qu’elle avait découvert son mari blessé à leur domicile. Celui-ci a été transporté à l’hôpital. Les policiers ont plus tard été informés par les médecins qu’un objet métallique se trouvait dans son crâne.
Une enquête bâclée
C’est alors que les policiers, vers minuit, ont décidé de débarquer au domicile de Mme Côté.
Sans informer Mme Côté qu’ils croyaient que la victime avait été atteinte d’une blessure par balle, ils lui expliquent qu’ils veulent seulement déterminer ce qui s’est produit et vérifier la sûreté des lieux.
À 3h du matin, Mme Côté est transportée au poste de police et ce n’est qu’à 5h23 qu’elle est informée du droit à l’avocat. Avant cela, aucune mise en garde relative aux accusations de tentative de meurtre sur la victime n’est donnée à Mme Côté.
Un peu plus tard, Mme Côté fût interrogée toute la journée et ce jusqu’à 20h00 alors qu’elle n’avait pas dormi. C’est alors que sous la pression considérable des policiers, Mme Côté a fait plusieurs déclarations incriminantes.
Le mépris du droit : Une tragédie
Rien ne permet de justifier la commission d’un acte horrible. On ne peut également accepter que l’on méprise les fondements de notre droit. Cela mettrait directement en doute son intégrité. La tolérance de gestes aberrants par les policiers est inacceptable.
Il y a différentes façons de mépriser la loi. Il y en a une qui nous répugne tous et c’est la commission d’un acte criminel. Nos corps policiers et notre système de justice pénale sont là pour prévenir ces gestes répréhensibles. Ces derniers ont, en général, suffisamment de moyens afin des criminels soient poursuivis et pour qu’ils subissent les peines prévues.
Il y a une autre façon de mépriser la loi. Celle-ci est plus sournoise et c’est pour cette raison que les gens ont tendance à l’oublier. C’est spécifiquement parce qu’elle est sournoise que l’on doit s’en méfier et s’assurer de corriger cette violation. Cette violation, c’est celle par l’État lui-même de ses propres lois.
Les corps policiers relèvent des pouvoirs publics. L’origine de ceux-ci est à la base même de nos lois. Nous ne pouvons tolérer que des agents du gouvernement violent ses propres lois.
Au paragraphe 23, l’Honorable juge Guy Cournoyer écrivait dans son jugement du 30 novembre 2007: « [23] J’estime aussi que durant cet interrogatoire le droit à l’avocat de Mme Côté et son droit au silence n’ont pas été respectés lors de son interrogatoire par les enquêteurs Bellemare et Samson. Cette déclaration doit être exclue en vertu du par. 24(2) de la Charte en raison de l’atteinte à l’équité du procès. »
Le serment des policiers
Comme le souligne la Cour suprême, les policiers font le serment de veiller au respect de la loi. Ainsi, on ne peut s’attendre à rien de moins que des comportements respectueux des droits fondamentaux.
Le travail de la défense
Notre cabinet tient à souligner le travail exceptionnel des avocats de la défense, c’est-à-dire Me Carole Gladu, Me Josée Veilleux et Me Karine Guay. Sans le travail d’avocats compétents, dans ce cas ci d’avocates, il serait trop facile de mépriser la loi et la Constitution.
L’application de la loi
L’admission d’un élément de preuve obtenu en violation d’un droit fondamental serait de plus susceptible de déconsidérer l’administration de la justice. Il vaut mieux remettre en liberté un coupable que de tolérer l’indifférence des protections constitutionnelles
C’est donc pour ces multiples raisons que le juge du procès a exclu la preuve obtenue par la police en violation de ses droits fondamentaux. Elle avait alors été acquittée. C’est aussi pour cette raison que la Cour suprême a choisi de valider cette décision sans ordonner la tenue d’un nouveau procès.
Une justice vaine? Non!
Il est vrai que le meurtre de la victime demeure impuni. Toutefois, notre système judiciaire a fait le pari que la punition du crime ne pouvait se faire au détriment de l’intégrité de notre justice. C’est probablement le pari le plus judicieux et intelligent.
Qu’en pensez-vous ?
Avocat Saint-Jérome /Laval /Joliette