Un samedi soir, après une fête arrosée, vous avez un chauffeur désigné, conscient de votre état d’ivresse.
Tout heureux de votre soirée, sans y penser, vous laisser votre sac remplit de drogues sur la banquette de votre auto. Vous rencontrez une patrouille qui vous demande de vous immobiliser. S’ensuit une fouille du véhicule et une arrestation.
Alors que vous n’avez pas pris votre voiture, justement pour éviter de conduire avec les facultés affaiblies et de commettre ainsi une infraction criminelle, vous vous retrouvez tout de même en état d’arrestation avec une accusation de possession de stupéfiants dans le but de trafic et vous devez comparaître à la Cour du Québec chambre criminelle.
Pourquoi en est-il ainsi et quelles en sont les conséquences?
Est-ce que les policiers avaient le droit de vous arrêter? Ce texte vous résumera brièvement les infractions reliées aux stupéfiants et vous donnera un aperçu des conséquences et des sanctions possibles.
Les types de substances
Il existe différents stupéfiants interdits au Canada, classés dans différentes annexes de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Ces stupéfiants sont appelés «substances désignées» et comprennent toutes les formes synthétiques et naturelles des substances, ainsi que toutes les choses contenant une substance désignée, même infime (donc qui entrent dans la composition d’une substance désignée). De plus, les annexes qui décrivent les substances désignées réfèrent également aux substances analogues, c’est-à-dire dont la composition chimique «est essentiellement la même que celle d‘une substance désignée» .
La Loi regroupe en six catégories les substances interdites au Canada:
- Annexe 1 : opium, morphine, cocaïne, codéine, héroïne, méthadone, phencyclidine (PCP, kétamine)
- Annexe 3 : amphétamines, mescaline, ecstasy, flunitrazepam (rohypnol), GHB et psilocybine (champignons magiques)
- Annexe 4 : barbituriques, stéroïdes anabolisants, librium et valium
- Annexe 5 : certaines drogues chimiques
- Annexe 6 : éphédrine, pseudo-éphédrine, acide lysergique (LSD)
Ainsi, la Loi vise un grand nombre de stupéfiants et permet une souplesse dans leur définition et permet de contrôler tant les drogues de confection d’aujourd’hui que celles à venir.
Les types d’infractions reliées aux stupéfiants
Possession
Selon l’article 4(1) de la Loi, seule la possession des substances désignées incluses aux annexes 1 et 3 sont interdites.
Évidemment, les personnes autorisées par règlement à posséder ces substances sont exemptées et maintenant la possesion de canabis est légale au Canada.
Afin de prouver la possession, la Couronne devra démontrer que l’accusé exerçait un certain contrôle sur la substance désignée et qu’elle en connaissait la nature. De plus, elle devra prouver que la substance en question est bien mentionnée à l’une des trois premières annexes de la loi.
Contrairement à ce que plusieurs personnes croient, la quantité de drogue possédée n’a pas d’importance sur l’accusation.
Cependant, les tribunaux ont établi que l’accusé devait en posséder une quantité suffisante pour être mesurable, tangible et visible.
Ainsi, des traces de cocaïne sur un sac ne suffisent pas pour être reconnu coupable de possession de stupéfiants selon l’annexe 1 de la Loi. Maintenant, le temps nous dira si les tribunaux renverseront cette règle, puisque la Loi stipule dorénavant qu’une substance désignée inclut toute chose en contenant, et ce, même superficiellement.
Trafic de stupéfiant
L’article 5(1) de la Loi interdit le trafic de substances désignées aux annexes 1 à 4 et la possession en vue d’en faire le trafic.
L’article 2 de la Loi définit le trafic de stupéfiants comme le fait de vendre, d’administrer, de donner, de céder, de transporter, d’expédier ou de livrer une substance désignée.
Également, le fait d’offrir d’effectuer une de ces opérations constitue du trafic.
En ce qui concerne la vente, cela inclut aussi la vente d’une autorisation permettant l’obtention d’une substance, comme par exemple, les ordonnances médicales émises par un médecin sans aucun fondement médical. Cela inclut également le fait de mettre en vente, d’exposer, de posséder dans le but de vendre et le fait de distribuer à titre onéreux ou gratuit une substance désignée.
Donc, le simple fait d’acheter un stupéfiant ne constitue pas du trafic. Mais celui qui aide l’acheteur, en trouvant par exemple un dealer, pourra être reconnu coupable de complicité de trafic de stupéfiants.
L’article 5(5) de la Loi mentionne qu’il n’est pas important que la substance en question soit vraiment une substance désignée par une des annexes. Le fait de présenter une substance comme un stupéfiant, même si cela ne réussit pas à berner l’acheteur, constitue du trafic.
Également, le fait de croire erronément que la substance est une substance désignée aux annexes 1 à 4 suffit pour entraîner la culpabilité de la personne pour trafic de stupéfiants.
Le terme «administrer» signifie le fait d’aider une personne à consommer ou à s’injecter une substance désignée, et non le fait de lui en procurer. En ce qui concerne le terme «distribuer», les tribunaux l’ont interprété comme le fait d’offrir en vente de façon générale.
Pour le terme «donner», cela n’implique pas nécessairement un véritable transfert de propriété de la substance d’une personne à une autre. Du moment que la possession physique d’une substance a été transférée d’une personne à l’autre, cela suffit pour qu’il y ait une accusation de trafic.
Finalement, en ce qui concerne la notion de «transporter», les tribunaux l’ont établie comme le fait de déplacer une substance dans le but de la vendre ou de la distribuer.
La preuve
L’article 51 de la Loi permet qu’un certificat d’un analyste désigné par le ministre de la Santé et du Bien-être social du Canada soit admissible en preuve.
Ce certificat fait foi de son contenu. En d’autres mots, la Couronne n’a pas à faire témoigner l’analyste pour prouver le contenu du certificat.
Le procureur de la Couronne doit fournir un préavis à l’accusé de son intention de produire un certificat et également une photocopie de ce dernier.
Exceptionnellement, et avec la permission du tribunal, l’accusé pourra exiger que l’analyste témoigne lors du procès.
Également, la Couronne devra démontrer la chaîne de possession des substances.
En d’autres mots, la Couronne devra prouver que lors du procès les substances sont bien celles qui ont été saisies et qui étaient en possession de l’accusé, en établissant l’identité de toutes les personnes qui ont manipulé ces substances et dans quelles circonstances cette pièce à conviction a été gardée.
Les peines
Il n’existe aucune peine minimale pour les infractions reliées aux stupéfiants. Cependant, les peines maximales prévues par la Loi diffèrent selon les infractions :
Possession :
Pour avoir été retrouvé en possession d’une substance désignée à l’annexe 1, l’accusé peut encourir une peine maximale de 7 ans de prison. Si la drogue est comprise dans l’annexe 2, la peine maximale est de 5 ans moins un jour d’emprisonnement.
Finalement, pour la possession d’une substance comprise à l’annexe 3, la peine maximale d’emprisonnement possible est de 3 ans.
Trafic et possession dans un but de trafic :
Pour avoir fait le trafic d’une substance désignée ou en avoir eu en sa possession dans un but de trafic aux annexes 1 et 2, la peine maximale d’emprisonnement est la perpétuité.. Pour une substance prévue à l’annexe 3, la peine maximale est un emprisonnement de 10 ans. Finalement, pour une substance désignée à l’annexe 6, la peine maximale est un emprisonnement de 3 ans.
Importation, exportation et possession dans un but d’exportation :
Pour avoir importé, exporté ou possédé dans un but d’exportation une substance désignée aux annexes 1 et 2, la peine prévue est l’emprisonnement à perpétuité. Pour une substance comprise à l’annexe 3, la peine est un emprisonnement maximal de 10 ans. Finalement, pour un stupéfiant prévu aux annexes 4 et 5, la peine maximale est un emprisonnement de 3 ans.
Production :
Pour avoir fait la production d’une substance désignée aux annexes 1 et 2, la peine maximale est l’emprisonnement à perpétuité. Cependant, s’il s’agit de la production de cannabis, la peine maximale prévue est de 7 ans d’emprisonnement. Finalement, la peine prévue pour la production d’un stupéfiant compris à l’annexe 4 est un emprisonnement de 3 ans.
Les défenses
La personne accusée de possession d’une substance désignée peut invoquer la défense d’erreur de fait au sujet de la nature de la substance possédée.
Évidemment, cette erreur doit être sincère et la croyance de l’accusé, innocente. Cette défense est possible compte tenu de l’élément de connaissance exigé par la définition de possession.
En d’autres mots, l’accusé, en aucun moment, ne doit s’être douté que la substance qu’il possédait était en fait une substance désignée à l’une des annexes de la Loi, et donc illégale.
Par exemple, la personne qui s’est fait arrêter pour possession de cocaïne, alors qu’il croyait sincèrement posséder de l’héroïne, ne pourra pas invoquer cette défense puisque sa croyance n’était pas sincère, ni innocente.
Conclusion
Ce texte constitue un résumé des infractions reliées aux stupéfiants. Il se veut de nature informative et ne saurait en aucun cas se substituer à l’opinion juridique d’un professionnel en la matière. La consultation d’un avocat criminaliste permet de faire la lumière sur votre dossier, de façon personnalisée, et de mettre toutes les chances de votre côté pour obtenir une solution juste à votre problème.
Qui plus est, selon la substance désignée en cause, et selon l’infraction reliée aux stupéfiants qui a été commise, les conséquences et sanctions diffèrent. Une raison importante de plus pour contacter un professionnel.
Merciii pour ce bel article 🙂
Merci de nous suivre et de manifester votre intérêt . Salutations
Un loi importante à mes yeux qui risque de lâcher un peu de lest dans les mois à venir malheureusement en France…