Il s’agit d’une disposition législative (184 Code criminel) qui prévoyait la possibilité de faire de l’écoute électronique sans mandat, dans des cas d’urgence.
Le problème de cet article, selon la Cour suprême ne réside pas dans le fait que cet article visait à intervenir dans des situations d’urgence où un risque réel de dommages sérieux devait être enrayé, mais plutôt dans le fait qu’il n’y avait aucun mécanisme de surveillance dans son utilisation.
Il est clair que la Cour suprême ne souhaite pas donner « carte blanche » aux interventions policières et que ces derniers devront, de par leur décision, être soumis à un contrôle judiciaire.
Notion d’urgence et conflit avec la charte
«En théorie, le législateur peut accorder un tel pouvoir restreint d’écoute électronique en cas d’urgence. Il est plus difficile de décider si le pouvoir précis conféré à l’art. 184.4 établit un équilibre raisonnable entre le droit d’un particulier d’être protégé contre les fouilles, perquisitions et saisies abusives et l’intérêt de la société à prévenir des dommages sérieux.
Dans la mesure où le pouvoir d’intercepter des communications privées sans autorisation judiciaire ne peut être exercé qu’en cas d’urgence pour éviter des dommages sérieux, cet article établit un juste équilibre.
Cependant, l’art. 184.4 viole l’art. 8 de la Charte, car il ne prévoit pas de mécanisme de surveillance et, tout particulièrement, n’exige pas qu’un avis soit donné aux personnes dont les communications privées ont été interceptées.
Cette violation ne peut être validée par l’application de l’article premier de la Charte.
En effet, l’article prévoyait, somme toute, plusieurs conditions et garanties qui faisaient en sorte que l’on devait se trouver dans une réelle situation d’urgence. Il s’agissait de « motifs raisonnables » de croire que l’« urgence de la situation » est telle qu’une autorisation ne peut, « avec toute la diligence raisonnable », « être obtenue sous le régime de la présente partie ». Ces conditions étaient cumulatives et comprenait une contrainte au niveau du temps. Il fallait agir vite et la poursuite devait pouvoir démontrer, selon la balance des probabilités, qu’elles avaient respectées ses conditions dans l’urgence.
L’article 188 du Code criminel prévoit lui aussi un mécanisme d’urgence pour l’interception des communications. Dans ce cas, il s’agit d’une contrainte explicite de temps, soit 36 heures. Il s’agit aussi d’un mécanisme plus balisé, en ce sens où une demande est présentée par un policier « désigné » à un juge « désigné ».
Cela propose, selon la Cour suprême, une surveillance judiciaire plus claire et intrinsèque. Il s’agit aussi d’un processus somme toute rapide, qui nécessite simplement une présentation (requête) orale.
Quoique l’objectif de prévenir des dommages sérieux soit conforme au principe d’intérêt public et une limite valable aux libertés individuelles, reste que l’exercice n’est pas suffisamment encadré et géré.
En effet, une personne peut ne jamais être informée que ses communications ont été interceptées.
En ce sens, elle ne pourrait jamais contester cet exercice qui pourrait s’avérer non fondé et malveillant ou qui pourrait éventuellement être contesté. Ce n’est que lors d’une poursuite criminelle que l’utilisation serait connue.
Les faits de la cause étaient relatifs à l’interception de communication dans un contexte d’enlèvement. La fille dont le père aurait été enlevé, recevait des appels qui ont alors été mis sous écoute. Ce n’est certes pas une décision qui touche ou s’intéresse aux faits en cause, mais bien au principe d’absence d’encadrement dans l’exercice discrétionnaire d’un pouvoir / décision d’un policier.